Contenu Local au Burkina Faso : levier essentiel pour un développement minier durable

Les ressources minérales du Burkina Faso, pierre angulaire de son économie, promettent un avenir prometteur. La réussite de cette vision repose sur la maximisation des avantages de l’exploitation minière pour les populations locales. Dans cette perspective, le gouvernement burkinabé a instauré le Secrétariat technique du Contenu local et de la promotion des investissements (ST-CLPI), une entité centrale au sein du ministère de l’Énergie, des Mines et des Carrières. Il s’attache à développer le capital humain, valoriser les produits miniers localement, promouvoir les investissements nationaux et évaluer les stratégies nationales du contenu local dans ces domaines. Dans cet entretien, le secrétaire technique du Contenu local, Zéphirin Z. Zongo parle de l’importance de cette structure dans le secteur minier. 

Dans l’organigramme actuel du ministère de l’Energie, des Mines et des Carrières (MEMC), figure le Secrétariat technique du Contenu Local et de la Promotion des Investissements. Qu’est ce qui a motivé la création de cette direction centrale ?

Les ressources extractives sont une source importante de revenus et d’emplois pour les pays dé-tenteurs tel que le Burkina Faso. L’impact de cette exploitation sur le développement est parfois difficilement perceptible au niveau des populations ; ce qui engendre des frustrations et des conflits. En effet, pour les pays disposant de ressources naturelles, les citoyens espèrent que l’exploitation de ces ressources engendre des retombées à leur profit. Ainsi, depuis quelques années, le Gouvernement Burkinabé a opéré des réformes dans le secteur minier. Ces réformes visenà promouvoir un développement économique durable à travers une bonne exploitation des revenus miniers et des opportunités offertes par le secteur. L’organigramme du ministère de l’Energie, des Mines et des Carrières reflète donc cette option du Gouvernement avec la création du Secrétariat technique du Contenu local et de la promotion des investissements (ST-CLPI).

L’objectif visé à travers la création de cette structure est d’une part de mettre en cohérence toutes les initiatives en matière de promotion des nationaux sur toute la chaîne de valeurde l’activité minière et d’autre part de promouvoir le potentiel minier de notre pays.

Quelles sont les missions assignées au ST-CLPI ?

Aux termes de l’article 32 du décret portant organisation du MEMC, le ST-CLPI a pour mission la conception, la coordination et l’application de la politique du Ministère en matière de contenu local et de promotion des investissements. A ce titre, elle est chargée : de renforcer les retombées des secteurs minier et énergé- tiques dans l’économie nationale, de développer le capital humain dans les secteurs de l’énergie et des mines, de valoriser au niveau national les produits miniers et de promouvoir les investissements nationaux dans les secteurs de l’énergie et des mines. Elle s’occupe également de piloter, suivre et évaluer les stratégies nationales de contenu local dans les secteurs de l’énergie et des mines, de mener des analyses économiques, financières et prospectives des secteurs de l’énergie et des mines et de contribuer à la mise en place d’une fiscalité optimale dans les secteurs de l’énergie et des mines. Par ailleurs, elle se charge de rechercher, négocier des partenariats entre le Ministère de l’Energie, des Mines et des Carrières et les structures étatiques, sous régionales et internationales ainsi que les secteurs privés et de renforcer la visibilité nationale et internationale des secteurs de l’énergie et des mines.

En quoi consiste concrètement les promotions énergétique et minière ?

Le secteur de l’Énergie, des Mines et des Carrières est sans conteste l’un des moteurs de développement de notre économie. Ce sont deux domaines qui nécessitent des investissements importants. Ainsi, leur développement, commande une véritable stratégie de promotion des investissements car, qualifiés de secteurs de « production hautement capitalistique » au regard du poids du capital (ressources financières) que cela requiert. Il s’agit alors d’attirer les investissements en faisant connaître le potentiel et les opportunités dans ces secteurs aussi bien au niveau national qu’à l’international. –

Pour ce faire, le ST-CLPI mène des actions de promotion telles que l’organisation des événements de promotion tels que la Semaine des Energies et Energie renouvelable d’Afrique (SEERA), a Semaine des Activités Minières d’Afrique de l’Ouest (SAMAO), la Journée de l’Artisan Minier (JAM) et la coordination de la participation du Ministère aux espaces de promotion des investissements énergétiques et miniers dans le but de renforcer la visibilité nationale et internationale des secteurs énergétique et minier Burkinabè.

Le Gouvernement burkinabè a adopté le Contenu Local dans le secteur de l’énergie, des mines et des carrières. Que renferme ce concept de Contenu Local ?

Le concept de contenu local est né en Grande Bretagne dans les années 1970 et s’est développé dans la plupart des industries pétrolières et vise à faciliter le développement d’un tissu industriel local et des compétences locales en les faisant participer aux activités des industries extractives afin d’améliorer les retombées du secteur de des industries extractives au-delà des recettes directes reversées à l’État. En termes plus simples, le contenu local peut se comprendre comme la valeur qu’un projet d’extraction apporte à l’économie locale, nationale ou régionale, au-delà des revenus des directs tirés de l’exploitation de ces ressources.

De nos jours, des pays comme le Botswana, l’Afrique du Sud ou encore le Ghana constituent des modèles en matière gestion vertueuse des ressources minérales car ayant réussi dans une moindre mesure à transformer structurellement leurs économies à travers la promotion de l’expertise nationale.

Pourquoi le contenu local est-il un sujet important pour le Burkina Faso ?

Le Code Minier du Burkina Faso de 2003 ne faisait pas clairement référence au contenu local sous sa section Droits et Obligations des Opérations Minières. Cela était tout de même mentionné dans la Convention Minière-Type. Cependant, les données dans l’industrie minière indiquent que les achats de biens et services par les sociétés minières sont de loin plus importants que les revenus que le secteur génère annuellement à travers les paiements de taxes et impôts par ces sociétés. De ce fait, les stratégies de promotion des achats locaux de biens et services par les sociétés minières sont susceptibles d’induire des effets positifs sur l’économie nationale.

Pour le cas du Burkina Faso, une étude diagnostique faite en 2018 a révélé la faiblesse de ces achats locaux. En effet, sur un échantillon de douze (12) mines, les achats de biens et services des s’élevaient à 456,5 milliards de FCFA dont 71,7 milliards de FCFA auprès de fournisseurs locaux, soit 15, 5 %. Bien que ces données soient relativement moins récentes, cela traduit les efforts qui doivent être faits en termes d’achats locaux de biens et services. C’est ainsi que l’adoption du Code Minier de 2015 a été adopté avec des innovations majeures dans le but d’impulser une nouvelle dynamique dans la gestion de notre secteur minier. Ce code intègre des dispositions en matière de contenu local en ses articles 101 et 102. La mise en œuvre des dispositions de ces articles précités combiné à la vision actuelle du pays en matière d’exploitation minière ont permis d’adopter une stratégie nationale du contenu local ainsi qu’un dispositif réglementaire notamment en matière de fourniture locale des biens et services aux mines.

En termes simples, il s’agit de faire en sorte que les entreprises dont le capital appartient majoritairement à des burkinabé puissent avoir accès aux marchés de biens et services des sociétés minières de manière préférentielle d’une part et d’autre part de promouvoir l’expertise nationale sur le plan des ressources humaines. Le dispositif juridique sera renforcé par l’adoption en cours de la loi sur le contenu local.

Dans le domaine de l’énergie, une stratégie du contenu local est en cours d’élaboration. L’objectif étant de créer des conditions pour favoriser l’émergence d’une expertise nationale dans le domaine de l’énergie.

En quoi consiste sa mise en œuvre ?

La stratégie du contenu local dans le secteur minier est assorti d’un plan triennal glissant pour sa mise œuvre. Le ST-CLPI est chargé de coordonner la mise en œuvre des activités prévues dans le plan d’actions triennal ainsi que du suivi du respect des dispositions règlementaires en vigueur.

Au-delà du Département en charge des mines, la mise en œuvre de la stratégie implique des acteurs aussi étatiques que non-étatiques. Il s’agit entre autres de certains Départements ministériels, des collectivités territoriales, des faîtières ou organisation socio-professionnelles des acteurs du secteur privé (CCIBF, CMB, ABSM, ACAB, AFEMIB, ACB), des organisations de la société civile et des partenaires techniques et financiers. Du reste, le décret portant fixation des conditions de la fourniture locale dans le secteur minier et l’arrêté portant établissement de la liste des biens et services fournis aux entreprises minières ont été adoptés respectivement le 11 novembre et le 30 décembre 2021. Ces textes sont entrés en vigueur au 1er janvier 2022. Dans le but de permettre aux principaux acteurs d’accéder à l’information sur le contenu local, un plan de communication a été élaboré. Dans ce sens, plusieurs ateliers de vulgarisation des textes et

des rencontres de concertations ont été organisés par le ST-CLPI en collaboration avec les parties prenantes telles que la Chambre de Commerce et d’Industrie du Burkina Faso (CCI-BF), la Chambre des mines du Burkina et l’Alliance burkinabè des fournisseurs des biens et services miniers (ABSM). Plusieurs activités notamment des études ont été amorcées dans le sens de l’amélioration de la compétitivité des entreprises nationales. Il s’agit entre autres de l’étude de faisabilité pour la construction des entrepôts sous douanes destinés aux fournisseurs de biens et services aux mines, en phase de réalisation, l’étude de faisabilité pour la mise en place d’une plateforme de mise en relations d’affaires entre les fournisseurs de biens et services miniers et les donneurs d’ordre dont le processus de recrutement du consultant est en cours et de l’étude de faisabilité sur la mise en place d’un fonds de garantie pour soutenir les champions nationaux dans le secteur minier. Il y a aussi l’étude d’évaluation des pratiques et performances du contenu local par les sociétés minières et de la capacité du secteur privé local à établir des liens commerciaux avec les investissements directs étrangers au Burkina Faso qui permettra d’établir une meilleure cartographie des fournisseurs ainsi que biens et services fournis dans le secteur minier.

Quelles dispositions doivent prendre les entreprises burkinabè afin de profiter

au mieux des avantages du Contenu Local ?

Le Gouvernement a créé les conditions qui permettent un accès aux marchés par les entreprises burkinabè certes, mais il faut évidemment que celles ci puissent répondre efficacement aux besoins des sociétés minières. Les nouvelles dispositions relatives au contenu local ne doivent pas non plus compromettre la continuité des activités d’exploitation. Ce doit être gagnant-gagnant pour les trois acteurs que sont l’Etat, les fournisseurs de biens et services, et les sociétés minières.

 L’un des éléments à prendre en compte est la facilitation de l’accès à l’information au niveau des sociétés minières. Il est important que les entreprises nationales puissent avoir les informations sur les besoins des sociétés, leurs canaux de publication des offres et toutes les conditions à remplir s’il y’en a, de manière claire.

Du côté de l’administration, les sociétés minières et leurs sous-traitants sont tenues de transmettre leurs plans d’approvisionnement régulièrement mais nous invitons aussi les promoteurs des entreprises nationales à aller vers les sociétés et à développer les stratégies qu’il faut pour conquérir et garder ces nouveaux débouchés. Elles doivent rapidement répondre aux exigences aussi des sociétés minières en termes de délais, de prix et de qualité. Pour cela, il est opportun pour les faîtières de développer et de mettre en œuvre les actions de renforcement de capacités au profit du privé national et de les accompagner pour l’accès au financement auprès des banques et établissements financiers. Certaines de ces actions sont déjà planifiées dans la stratégie du contenu local et leur mise en œuvre réussie sera assez bénéfique aux entreprises nationales.

Quel appel avez-vous à l’endroit des acteurs de mise en œuvre du Contenu Local ?

Le principal appel, c’est l’adhésion, l’engagement et la mobilisation. Ce sont ces éléments qui vont nous permettre de réussir l’implémentation du contenu local dans notre pays. Cet appel est adressé aussi bien au secteur privé national qu’aux sociétés minières et sous-traitants. Chaque acteur est invité à faire preuve de bonne foi. Je voudrais rassurer les différents partenaires de la volonté et la détermination du département en charge des mines, à travers le ST-CLPI, pour l’opérationnalisation intégrale des textes règlementaires relatifs à la fourniture locale.

Pour finir, nous espérons que les échanges qui ont lieu pendant la présente édition de la SAMAO permettront de dégager des recommandations et d’identifier des pistes à explorer pouvant utilement améliorer le contenu local aussi bien au Burkina Faso que dans les autres pays africains afin d’améliorer l’impact de l’exploitation minière sur les économies nationales.

Source: Magazine SAMAO 2023

SAMAO 2024

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